Apprentissage : ce qui a changé depuis la loi "avenir professionnel"
Un million d’apprentis par an d’ici 2027 : ce qui semblait être un vœu pieux du gouvernement est en passe de devenir une réalité. En effet, le monde de l’apprentissage connaît actuellement une transformation profonde, tant dans le public accueilli que dans les nouveaux modes d’enseignement qu’il propose.
La loi “Avenir professionnel” de 2018 : un nouveau format d'apprentissage
Si l’objectif fixé au début du premier quinquennat d’Emmanuel Macron semblait presque inaccessible, il est aujourd’hui tout proche. Fin décembre 2022, la France comptait 980 000 apprentis. C’est 14 % de plus que l’année précédente. Et plus du double par rapport à l’année 2017. Enfin, entre 2017 et 2022, le nombre de nouveaux contrats en alternance dans le secteur privé a été multiplié par 2,8 (INFREP). Ces données démontrent que la loi “avenir professionnel” introduite en 2018 a en effet donné un élan particulier à l’apprentissage en le rendant plus attractif et accessible à un plus grand nombre.
Aujourd’hui, cette tendance à la hausse ne montre aucun signe de ralentissement. Elle est due en partie à l’aide exceptionnelle à l’embauche d’apprentis mise en œuvre par le gouvernement entre l’été 2020 et l’été 2022, une aide unique maintenue jusqu’à 2027 pour soutenir les employeurs qui souhaitent recruter un jeune en alternance pour transmettre et renouveler leurs connaissances et compétences.
Apprentissage et mobilité : une équation compliquée ?
En matière de mobilité, la voie de l’apprentissage bénéficie d’un dispositif équivalent à celui de l’enseignement supérieur : Erasmus +. Cependant, dans les faits, peu d’apprentis ont la possibilité de bénéficier de ce programme, en raison du contrat d’apprentissage qui lie l’apprenant à une entreprise d’accueil.
Dans le cadre de France 2030 et de l’appel à projets dédié à la formation “Compétence et métiers d’avenir”, l’association Euro App Mobility - présidée par le mayennais et ancien eurodéputé Jean Arthuis - a ainsi lancé en juin 2022 le projet MONA. Ce dispositif a pour ambition d’aller plus loin qu’Erasmus+ en développant la mobilité longue des apprentis en Europe. Le projet MONA s’est fixé l’objectif de permettre à plus de 15 000 apprentis de partir vivre une expérience professionnelle dans un pays européen, d’ici à 2026. Pour y parvenir, l’association y a alloué un budget global de 25 millions d’euros, dont 17 millions sont financés par l’Etat.
Avec 5 CFA (Centres de formation d’apprentis) mobilisés dans ce projet (un par département), les Pays de la Loire font partie des régions les plus impliquées.
Aussi, comme le précise Céline Dorel, tous les jeunes en âge de partir à l’étranger ne sont pas aptes à disposer de ce programme. Le profil doit être assez spécifique et pouvoir faire preuve d’un niveau scolaire acceptable, afin de progresser en toute autonomie sur place. Enfin, le niveau d’anglais de l’apprenti est bien évidemment pris en compte.
Cependant, du fait du niveau de formation élevé au CFA ainsi que de l’encadrement des différents tuteurs en entreprise, les jeunes adoptent un comportement très professionnel dès leur arrivée à l’étranger.
En somme, le dispositif MONA a pour avantage d’à la fois faire grandir l’apprenti et d’enrichir le CFA, via une opportunité de monter en compétences et d’ainsi se positionner avantageusement dans un secteur très concurrentiel.
“Ça fait grandir tout le monde. Notre ambition est de faire vivre à nos apprentis, grâce à cette mobilité, une expérience marquante. Les apprentis qui partent en mobilité deviennent nos ambassadeurs, et nous en sommes fiers.”
Intelligence artificielle et réalité virtuelle : les nouvelles ressources de l’apprentissage ?
Claire Bruand est responsable pédagogique pour Eurespace Formation à Cholet et responsable du pôle départemental Ingénierie pédagogique Innovation et Numérique.
En effet, ces technologies entrent progressivement dans les processus d’apprentissage, de la même manière que dans notre quotidien. Plus concrètement, “l’IA pourra faciliter la création de supports de cours, de fiches de synthèse, de présentations Powerpoint, de jeux pédagogiques…”. Pour Claire Bruand, “l’IA doit être considérée par le formateur comme un assistant lui fournissant des propositions qu’il pourra corriger et adapter pour une bonne prise en compte des profils de nos apprenants et une parfaite adéquation aux objectifs de l’offre de formation .”
De son côté, la réalité virtuelle fait doucement mais sûrement son entrée dans les formations du domaine de la coiffure et de la vente.
IA et VR : comment les intégrer sur le terrain de l’apprentissage ?
En outre, sur le terrain, l’un des enjeux principaux est de faire les bons choix d’outils malgré un contexte d’évolution rapide et d’éventuels problèmes de compatibilité. Par exemple, un casque de réalité virtuelle acheté à l’instant T peut se retrouver supplanté quelques mois plus tard par un autre plus performant.
Cependant, une chose est sûre : ces outils de formation professionnelle vont faire bouger les modèles pédagogiques classiques. Florence Bessou, responsable pédagogique du Centre Pierre Cointreau de la CCI 49 et référente départementale de la Stratégie Numérique estime que l’innovation numérique passe par 3 leviers essentiels :
- l’hybridation des formations ;
- la réalité virtuelle ;
- l’IA.
Flexibiliser les parcours de formation pour favoriser l’apprentissage du métier
En ce qui concerne plus spécifiquement l’apprentissage et la nécessité d’équilibrer son temps entre formation théorique et travail dans l’entreprise d’accueil, Florence Bessou précise : “Les apprentis apprécient de travailler à leur rythme, seuls ou en sous-groupes, tout en étant tutorés par leur formateur. Cette modalité permet également aux apprentis de développer des compétences directement transférables en entreprise, à savoir : participer et animer des réunions à distance.”
Mettre en scène des situations professionnelles concrètes
De son côté, la réalité virtuelle apporte indéniablement un plus aux formations en alternance. “Dès cette année, la réalité virtuelle sera déployée dans l’apprentissage de la coiffure, plus spécifiquement sur certaines compétences professionnelles comme celle de la géométrie dans l’espace sur le travail de la coupe.” Dans ce domaine d’apprentissage, la réalité virtuelle permet à l’élève de reproduire autant de fois que nécessaire les gestes qu’il doit acquérir pour en maîtriser la technique. Il bénéficie aussi d’un retour en streaming sur un écran suivi par le formateur. Dans le secteur de la vente, la réalité virtuelle permettra de simuler des situations spécifiques, dont celle de l’accueil ou de la gestion du conflit dans la relation client.
Mieux évaluer le niveau des apprentis
Récemment, l’IA a fait une entrée fulgurante dans le domaine de la formation, au sens large. En ce qui concerne la formation en alternance en particulier, l’intelligence artificielle permet, entre autres, une évaluation plus rapide du niveau des apprenants, grâce à la possibilité de personnaliser le contenu de formation, et d’ainsi libérer du temps au formateur afin de lui permettre de développer un accompagnement individualisé.
Intelligence artificielle et réalité virtuelle : des vecteurs d’innovation pour l’apprentissage ?
Aujourd’hui, IA et réalité virtuelle sont deux technologies sur le devant de la scène, qui occupent les ambitions du domaine de l’apprentissage et de la formation professionnelle tout comme de nombreux autres secteurs économiques français, mais qui amènent surtout à concevoir puis intégrer l’innovation dans les pratiques.
A ce sujet, et comme le souligne Florence Bessou, “l’innovation en matière de formation, c’est continuer d’accompagner nos apprenants de la façon la plus pertinente possible”. Pour les établissements de formation de la CCI de Maine-et-Loire, c’est aussi d’avoir la capacité de s’adapter à l’ensemble des publics en leur proposant des formations en apprentissage au plus près de leurs besoins et attentes.
Un article inspiré du magazine Anjou Eco n°74 - février 2024.