Prévention et gestion des déchets : La REP Emballages de la restauration en vigueur

Transition écologique
08.11.2024
Magazine
Afin de contribuer financièrement à la collecte, au réemploi et au recyclage des déchets issus des emballages de la restauration, une nouvelle REP (responsabilité élargie du producteur) est entrée en vigueur. Elle concerne les emballages "grand format" destinés spécifiquement aux professionnels ayant une activité de restauration. Explications avec Sylvie Moison, directrice de Ligépack, plateforme d'innovation au service de l'emballage alimentaire installée au Mans.
Sylvie Moison, directrice de Ligépack, plateforme d'innovation au service de l'emballage alimentaire.
Sylvie Moison, directrice de Ligépack, plateforme d'innovation au service de l'emballage alimentaire.

Pouvez-vous présenter cette nouvelle filière REP ?
Cette REP comme toutes les autres vise à réduire l’impact environnemental des emballages et de leurs déchets en poussant les entreprises à réduire (notamment la quantité de plastique à usage unique), réemployer et favoriser le recyclage des emballages (en favorisant par exemple les résines ou matériaux ayant des filières bien établies) à travers le paiement d’une éco-contribution sur le principe du pollueur-payeur. Elle est indiquée dans l’article 62 de la Loi Agec et son périmètre a été défini par l’arrêté du 20 juillet 2023. Le cahier des charges des éco-organismes a été publié en juillet 2023 : Citéo Pro a été agréé par les pouvoirs publics le 15 mars 2024 pour une durée de six ans.

Quelle est la date d’entrée en vigueur de cette REP ?
Elle est entrée en vigueur au 1er janvier 2024. Les entreprises concernées ont d’ores et déjà dû faire une "pré-déclaration" entre mars et juin 2024 et devront faire avant le 1er mars 2025 une double déclaration des emballages mis sur le marché en 2024 : emballages de la restauration et emballages ménagers et papiers graphiques.

Qui est concerné ?
Les industriels de l’agroalimentaire ou producteurs tels que maraîchers, agriculteurs, brasseurs mais aussi les cash and carry et centrales d’achats qui vendent à des professionnels de la restauration. Peuvent aussi devoir y souscrire des restaurants collectifs qui utilisent des emballages pour des préparations qu’ils conditionnent eux-mêmes (par exemple les plats mis en barquette).

Quels sont les emballages visés ?
Les emballages alimentaires primaires, c’est-à-dire ceux qui sont destinés à constituer une unité de vente consommateur, mais pas les emballages de regroupement, ni d'expédition comme les caisses américaines ou palettes qui seront concernés par la nouvelle REP Emballages industriels et commerciaux à partir du 1er janvier 2025. Il s'agit des emballages "grand format" car c'est le poids ou le volume du produit qui détermine s'il relève de la REP Emballages de la restauration. Si son format est supérieur aux valeurs de la liste des produits publiée en annexe de l'arrêté du 20 juillet 2023, il est concerné. Si son format est inférieur, il entre dans la catégorie des "emballages mixtes alimentaires". 
Prenons l'exemple d'une barquette de bolognaise constituée d’une barquette, de son opercule et de son fourreau : chaque élément devra être déclaré dans la REP Restauration si le produit qu’elle contient fait plus d’1,5 kg. Au-dessous de ce poids elle sera à déclarer dans la REP Emballages ménagers car considérée comme du mixte alimentaire (valable aussi bien pour les ménages que les professionnels).

Quels sont les objectifs de cette REP ?
Comme pour toutes les REP, le but est de réduire l’ensemble des déchets mis sur le marché, et bien sûr notamment plastiques. À travers cette REP, les industries agroalimentaires ou agriculteurs et autres entreprises qui vendent à des professionnels de la restauration auront également des objectifs de réduction d’emballage, de réemploi, de recyclage…

Comment les entreprises doivent-elles déclarer leurs emballages et dans quels délais ?
Avant juin 2024, les entreprises ont dû déclarer les emballages de la restauration mis sur le marché en 2023. Citéo Pro a facturé la contribution estimée des mises sur le marché 2024 des emballages professionnels de la restauration. Avant le 1er mars 2025, les entreprises déclareront à Citéo Pro la mise sur le marché des emballages de la restauration 2024. Elles communiqueront également la déclaration des emballages ménagers et mixtes alimentaires auprès de l’éco-organisme habituel (Citéo ou Léko). En mars 2025, Citéo Pro régularisera la contribution emballages 2024 de la restauration.

Quel est l’impact de cette REP sur les entreprises ?
Pour les entreprises metteurs sur le marché, il s'agit de bien distinguer trois catégories : les emballages ménagers, les emballages primaires professionnels de la restauration et les emballages destinés à des industriels de l’agroalimentaire (pour les produits alimentaires intermédiaires par exemple) qui ne sont pas concernés par cette REP.
Quant au coût additionnel que cette nouvelle REP aura pour les entreprises, il est difficile de l’estimer en termes d’éco-contribution même si la contribution au poids des emballages de la restauration est inférieure à celle des emballages ménagers. Dans tous les cas, un surcoût administratif et qualité mais aussi RSE est à prévoir pour les entreprises metteurs sur le marché. Elles devront connaître la composition, le poids des emballages pour les indiquer dans leurs déclarations.  Ces données entreront dans le suivi 3R (réduire, réemployer, recyler) des entreprises qui devront travailler à atteindre - ou justifier pourquoi elles n’y sont pas parvenues - les 20 % de réduction d'emballage dont 10 % de réemploi à fin 2025.


Propos recueillis par Karine Méteyer

 

Contact CCI 

Ludovic Courtier, directeur général d'Espri Restauration : "Nous n'avons pas de visibilité"

À Roëzé-sur-Sarthe, Espri Restauration élabore des plats cuisinés frais principalement pour les professionnels de la restauration. Cette entité de 350 salariés du pôle traiteur du groupe LDC est directement concernée par la REP Emballages de la restauration.

Les industriels de l'agroalimentaire sont tout à fait favorables à cette réglementation qui gère la fin de vie des déchets d'emballage via une contribution financière. Toutefois, Ludovic Courtier, directeur général d'Espri Restauration déplore un manque d'anticipation et de communication de la part de l'organisme agréé par les pouvoirs publics Citéo Pro. "Nous sommes partants pour adhérer à ce système. Agir sur nos emballages est indispensable. Je regrette toutefois l'attitude de Citéo Pro. Nous n'avons pas de visibilité car nous ne sommes pas informés sur les enjeux et les coûts à prendre en compte. Pour 2025, nous avons eu connaissance des éléments tarifaires mi-septembre seulement alors que nos prix ont déjà été transmis à bon nombre de nos clients. Ce n'est vraiment pas sérieux !" Chez Espri Restauration tous les emballages sont concernés avec des produits emballés sous vide et livrés dans des cartons chez les clients. "La totalité de nos tonnages est prise en compte, soit plusieurs milliers de tonnes par an. Le coût est de l'ordre de 1 à 10 centimes par kilo selon les conditionnements, ce qui représente plusieurs dizaines de milliers d'euros par an. C'est une partie de notre marge. Et comme Citéo Pro communique mal, nos clients acceptent difficilement que cette contribution soit répercutée sur nos prix de vente."